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 La Porte

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coupie

coupie

Messages : 20
Date d'inscription : 15/08/2010

La Porte Vide
MessageSujet: La Porte   La Porte EmptyMer 15 Déc 2010 - 15:27

Martha Swan s’appuya contre le mur et attendit que son essoufflement se dissipe. Elle venait de gravir l’escalier menant au septième étage d’un immeuble insalubre. Elle resta un moment à écouter sa respiration en lissant machinalement sa jupe noire. L’éclairage automatique de l’immeuble s’éteignit. Elle laissa passer quelques secondes et le ralluma. Puis elle appuya sur la sonnette. Une fois. Rien ne bougea. C’était bon signe. Elle ôta son doigt du bouton et frappa trois coupes, tous espacés de manière différente. La lourde porte tourna sur ses gonds en grinçant, libérant un espace juste assez grand pour laisser passer une personne. La jeune femme s’y engouffra.

Dans la pénombre de la pièce, on distinguait plusieurs autres silhouettes. L’une d’elle tendit une lourde veste à capuche noire que Martha enfila avant de rejoindre le groupe à la table ronde. Ils étaient au complet : la séance pouvait commencer.

Cela faisait bientôt six mois que Martha se rendait à chaque pleine lune dans ce vieil appartement délabré. Elle y venait de son plein gré, depuis qu’elle avait trouvé sous sa porte une lettre l’invitante à rejoindre, tous les mois, douze autres personnes. « Tu es différente », disait le papier. « Viens retrouver les tiens pour enfin accomplir ce pourquoi tu es née… » Bien sûr, si Martha avait été une personne censée, elle aurait ignoré l’étrange invitation. Mais poussée par la curiosité, elle s’était rendue à l’adresse indiquée.

Les mains de Martha cherchèrent celles de ses deux voisins. Les occupants de la pièce n’étaient éclairés que par la lueur d’une bougie, et leurs ombres semblaient danser sur les murs de la petite pièce. Sur la table étaient gravées les lettres de l’alphabet, les mots « Oui » et « Non » ainsi que d’autres caractères. La seule personne qui n’était pas habillée de noir portait une longue toge écarlate et un masque. On ne distinguait pas ses traits. Martha connaissait de vue une ou deux des personnes attablées, mais l’homme en rouge lui était en revanche parfaitement inconnu. Personne ne semblait réellement savoir qui il était. Il posa sa main à plat sur une planchette de bois à roulettes et tous fermèrent les yeux. Un long silence se fit. Martha essaya de vider son esprit pour ne penser à rien. Elle adorait ce moment. Pendant qu’un sentiment d’excitation mêlée de peur montait en elle, elle écouta les battements de son propre cœur. La voix du medium se fit soudain entendre :

« Esprit… Es tu là ? »


Alors tous ouvrirent les yeux pour fixer le Ouija. La planchette se mit à trembloter, jusqu’à avancer lentement vers le mot « Oui ». Martha sourit. Elle avait toujours redouté une absence de réaction. Mais l’esprit avait toujours répondu par l’affirmative à cette question. La première fois elle n’y avait pas cru. Mais au fil des séances, elle avait fini par admettre l’existence de forces qui la dominaient. Au début tout s’était bien passé. L’esprit avait répondu à toutes sortes de questions que se posaient les membres : des questions sur le passé, sur l’avenir… cela avait poussé Martha à faire confiance au medium. Mais voilà : à la deuxième séance, l’esprit avait demandé quelque chose en échange. Et l’homme en rouge n’avait pas hésité à désigner l’un de ses disciples. C’est ainsi que le premier membre avait disparu. Où ? Martha n’en savait rien, mais elle était convaincue qu’il n’était rien arrivé de fâcheux, et surtout elle voulait continuer à interroger l’esprit… C’est pourquoi elle vouait une confiance presque aveugle à l’homme en rouge. Et depuis, chaque mois, l’un des membres disparaissait…

« Esprit, es tu capable de rendre ce jeune homme amoureux de mademoiselle Swan ? »
demanda le medium en posant une photographie sur la table. Sur l’image posait un jeune homme souriant. Martha sentit son cœur s’accélérer : il s’agissait de Octave, que la jeune femme aimait depuis deux ans déjà. Voilà le type de questions que posaient les membres à l’esprit. Celui ci dirigea la planchette vers le « Oui ». Martha se mit à serrer plus fort les mains de ses voisins.

« Que demandes tu en échange ? »
résonna la voix grave de l’homme en rouge. Martha chassa l’inquiétude qui s’emparait d’elle tandis que le Ouija passait devant chacun des membres qui retenaient leur souffle. Un jeune homme lâcha les mains de ses voisins ; il tremblait. La planchette avait fini son trajet en s’arrêtant devant lui. Martha baissa les yeux pour ne pas rencontrer le regard de celui qui allait devoir partir par sa faute. Elle entendit le medium qui clamait :

« Tes désirs sont des ordres. »


Il fixa le jeune homme du regard avant de faire un signe de tête en direction d’une autre porte, plus petite, à l’opposé de la pièce. Le garçon se leva sans protester et se dirigea vers ce passage que seuls ceux qui disparaissaient avaient le droit de franchir. Il se retourna, s’inclina et sortit. L’homme à la toge écarlate, lui, souriait. Martha releva les yeux. Le medium mettait fin à la séance, mais la jeune femme ne l’écoutait pas. Elle était plongée dans ses pensées et mesurait les conséquences de ses actes. Ils n’étaient plus que huit dans la salle.

Un mois plus tard, ce fut une femme qui fut désignée par le Ouija. Elle disparut à son tour derrière la petite porte, tant redoutée des membres du cercle. Pendant les trente jours qui suivirent, Martha ne vécut plus que dans l’attente de la prochaine séance de spiritisme. Une partie d’elle lui dictait d’arrêter ; de tout lâcher, que les morts devaient rester à part, dans leur monde. Parfois elle songeait que cela ne marchait pas, d’autant plus qu’Octave ne lui avait pas accordé un regard depuis la promesse de l’esprit. Mais c’était plus fort qu’elle : elle revenait, chaque mois. Mais le jour où il n’y eut pas un, mais deux disparus…

Le medium revêtit sa toge rouge et son masque. Son costume faisait penser à celui des membres du Ku Klux Klan, songeait-il avec amusement. C’était la pleine lune. Il jubilait : bientôt son travail serait terminé. Il cacha une cordelette dans une de ses poches… et attendit. Bientôt, le premier coup de sonnette se fit entendre. Le sourire de l’homme s’agrandit, mais il ne broncha pas, jusqu’à ce que les trois coups résonnent, correctement espacés. Il ouvrit la porte à la jeune femme avant de lui tendre le costume rituel. Il s’assit à sa place et lui désigna l’unique chaise disponible, en face de lui. Martha Swan haussa les sourcils et le medium lui adresse un sourire carnassier qu’elle ne vit pas à cause du masque. Elle venait de se rappeler qu’elle était la dernière disciple, celle qui n’avait pas été « offerte » à l’esprit ? Une lueur d’angoisse apparut dans ses yeux à la grande satisfaction de l’homme en rouge qui prit sa main droite. Il posa la sienne sur le Ouija. Elle ferma les yeux et il put la contempler à sa guise…

« Esprit, es tu là ? »

En prenant un air concentré, il déplaça lui même la planchette vers le « Oui ». Il avait fait ce geste tant de fois…

« Il semblerait que ce soit notre dernière entrevue… », dit le medium, et à cette affirmation Martha ne put s’empêcher de prendre un air déçu.
« Nous refusons que tu reviennes nous hanter, c’est pourquoi je te demande de quitter nos vies à tout jamais ! »

A ces mots, la planchette de déplaça rapidement vers le « Non ». Le medium reprit de sa voix grave :
« Je t’offre tout ce que tu désires en échange. Que veux-tu, esprit ? »

Sur quoi, il poussa le Ouija vers Martha Swan. Tout cela avait été si facile… Alors il afficha le sourire du vainqueur et enleva ses mains de la planchette. La jeune femme eut un hoquet de surprise : on n’arrêtait pas comme cela une conversation avec un esprit ! Elle retira sa main de celle du medium et recula vers la porte d’entrée. Elle ne voulait pas disparaître, tout cela était impossible, un cauchemar… Elle chercha la poignée à tâtons et l’abaissa… en vain : la porte était fermée à clé. L’homme en rouge se leva, et calmement lui indiqua la seconde porte, la dernière qu’elle franchirait.

« Vous ne voulez quand même pas nous quitter maintenant… »

Elle comprit qu’elle n’avait pas le choix. Livide, la jeune femme avança vers la porte en se demandant où cela la mènerait. Elle le savait déjà, mais ne voulait pas se l’avouer. Alors, suivie du medium, elle ouvrit la porte et entra. Ce n’est que quand ses yeux s’habituèrent à l’obscurité plus dense qu’elle les distingua : tous les membres, allongés, enfermés chacun dans un cercle ou un pentacle était tracé, inertes. Seul le douzième était vide. Martha y pénétra et se recroquevilla instinctivement au milieu.

Le faux medium se rapprocha avec la joie féroce du prédateur trouvant sa proie sans défense. Son plan avait parfaitement fonctionné.

Quant à Martha, ce n’est que quand la cordelette se referma sur son cou qu’elle découvrit le stratagème…
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